mardi 1 mars 2011

Vision par disciplines et macro-classification


Le groupe de travail de la BSES avait mis en garde en avril 2010 :
« L’interdisciplinarité, voire la transdisciplinarité, voire l’holisme, sont les bases fondamentales de la recherche, de la production de connaissance […] La vision par disciplines, quoique ordonnée et fonctionnelle, présente un danger pour notre réputation internationale et compromet notre insertion dans les réseaux internationaux.»

Lors des présentations du projet en mai 2010, Mme Hadengue et Mme de Ribaupierre ont vanté les mérites de la future macro-classification basée sur la Classification Décimale Universelle (CDU). La macro-classification permettrait de piloter finement les collections, de déterminer les « profondeurs » d’acquisitions en cohérence avec les pôles d’excellence et les disciplines enseignées.  Pour déployer ce dispositif des postes de répondants par discipline (bibliothécaires dits « spécialistes de discipline ») sont en train d’être créés.


Début 2011, la macro-classification nous est « révélée », la baudruche se dégonfle : il s’agit d’une CDU dénaturée et alibi, masquant mal le fait qu'elle camoufle grosso modo les structures de l'Unige. Par exemple les six « disciplines » retenues en psychologie recoupent parfaitement les six groupes de recherche de la section de psychologie. Idem pour la médecine. Le bricolage incohérent et inconsistant des disciplines saute aux yeux : on y trouve de gros fourre-tout comme les « sciences sociales » considérées comme UNE discipline alors que les « sciences de l’éducation » sont détaillées en SIX disciplines. Les exemples pourraient être multipliés. Dans cette macro-classification la vision par discipline n’est ni ordonnée ni fonctionnelle, elle redouble inutilement et imparfaitement les structures.
Et ce ne sont pas des ajustements de « granularité » (terme vraisemblablement sorti du chapeau du consultant) de cette macro-classification qui pourront corriger un défaut de conception, la majorité des disciplines étant désormais décloisonnées.


En préambule de la conférence de Mme Rey, M. Vassali  avait évoqué le projet de restructuration des bibliothèque et insisté sur le fait qu’il ne fallait pas réinventer la roue et s’inspirer de ce qui a été fait ailleurs. Existe-t-il une autre université qui ait fait le choix d’une macro-classification pour piloter les collections de ses bibliothèques ?
Notons encore que l’audit a mis en évidence le problème des multiples systèmes de classification des ouvrages et recommande (moyennant une évaluation du coût) une reclassification commune. Etant grossière cette macro-classification ne pourra bien évidemment pas se substituer aux classifications existantes, utilisée en préfixe des classifications existantes elle provoquerait une illisibilité complète : on voit mal comment pourra être gérée « la politique de présentation physique des documents dans l’esprit d’une convergence universitaire cadrée par la macro-classification » (Référentiel, fiche 20, mission 2).

Cette  macro-classification ne permettra donc en aucun cas d’atteindre les ambitieux objectifs annoncés par Mmes Hadengue et de Ribaupierre. Au mieux, mais lourdement, elle permettra une gestion comptable des acquisitions.

3 commentaires:

  1. Quel talent, quel professionalisme... c'est tellement rare d'avoir accès à un discours si cohérent, ça nous change des propos de notre hiérarchie.

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  2. En fait la classification sert avant tout à classer l'ensemble du savoir, à l'UNIGE elle sert plutôt à éliminer ce dont on veut plus

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  3. On pourrait recommander au Consultant et à la Directrice de l'information scientifique la lecture d'Edgar Morin : "On peut néanmoins dire très rapidement que l'histoire des sciences n'est pas seulement celle de la constitution et de la prolifération des disciplines, mais en même temps celle de ruptures des frontières disciplinaires, d'empiètements d'un problème d'une discipline sur une autre, de circulation de concepts, de formation de disciplines hybrides qui vont finir par s'autonomiser ; enfin c'est aussi l'histoire de la formation de complexes où différentes disciplines vont s'agréger et s'agglutiner ».
    http://www.mcxapc.org/docs/conseilscient/morin_interdisciplinarite_021103.pdf

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